Un cru 2023 un peu bouchonné !
Après une année 2022 qui s’était terminé avec le superbe récit semi-autobiographique de James Gray (« Armageddon Time ») et des succès plus ou moins mitigés pour certains gros films.
2023 devait être l’année du retour de grands noms comme Steven Spielberg (« The Fabelsmans »), David Fincher, Christopher Nolan, Martin Scorsese, Ridley Scott mais aussi celui du plus grand aventurier du cinéma : Indiana Jones et le dernier baroud d’honneur des Gardiens de la Galaxie…
Les salles obscures ont malheureusement encore dû faire face à la concurrence des plateformes de streaming (Netflix, Disney+, HBO Max, Apple TV…) qui proposent de plus en plus de contenus originaux dans leurs catalogues sans passer par la case cinéma (sauf pour « Killers of the Flower Moon », « Napoléon » et « The Killer »). Au contraire, des cinéastes comme Michael Mann et son « Ferrari » passeront par la case Amazon Prime en France même si le film jouira d’une sortie en salle en Belgique et Denis Villeneuve a vu son « Dune Partie II » être repoussé à février 2024 à cause de la grève des acteurs et des scénaristes.
Le Box-Office international a souffert (surtout Disney avec « Wish », « Elémentaire » et « La Petite Sirène ») qui a vu la chute colossale de mastodontes comme « Indiana Jones et le Cadran de la destinée », « Mission Impossible Dead Reckoning Partie 1 » qui n’a pas vu Tom Cruise réussir le même exploit que « Top Gun : Maverick » et bien sûr Marvel qui s’est planté en beauté avec « The Marvels » et « Ant-Man Quantumania ».
Pourtant, deux films ont résisté au massacre, « Barbie » et sa fièvre rose et « Oppenheimer » qui a boum ! Deux longs métrages qui ont régné sur le Box-Office avec des recettes de plus 1 milliards 400 millions de dollars pour le premier et 952 millions pour le second. En leur compagnie, « Super Mario Bros » et ses 1 milliards 300 millions de recettes ont donc gonflé un Box-Office international à la peine…
Revenons sur une année qu’on attendait magnifique et qui s’avère finalement moins idyllique qu’annoncée. Voici le podium d’une année difficile pour les blockbusters.
LE TOP 10 des Meilleurs Films de l’année 2023 selon la Rédaction :
10. « Dalva» d’Emmanuelle Nicot :
« Dalva » est le premier film d’Emmanuelle Nicot traitant d’un sujet particulièrement difficile et illuminé par deux jeunes filles au talent indéniable… Doté d’un excellent scénario, habilement filmé (avec des moyens limités) l’histoire interroge et interpelle car la victime révoltée est ici dans le déni de ce qu’elle a vécu.
Pour un premier film et sur un sujet évoqué avec beaucoup d’habileté sans jamais tomber dans le pathétique ni la caricature, Emmanuelle Nicot réussit une belle performance, bien aidée par de jeunes actrices visiblement conscientes de ce que leur spontanéité apporte d’authenticité au long métrage.
Un drame bouleversant qu’on devrait présenter à tout éducateur ou travailleur social et à tout jeune juge aux affaires familiales.
9. « Empire of Light » de Sam Mendes :
Trois ans après « 1917 », film de guerre en plan-séquence, Sam Mendes nous entraîne dans le cadre intimiste d’une salle de cinéma, son « Empire of Light » …
Le cinéaste de « Skyfall » met ici en valeur l’histoire d’une salle de cinéma à travers une oeuvre dramatique sous forme de romance entre Hilary et Stephen (les personnages joués par l’Oscarisée Olivia Colman et le jeune Micheal Ward vu dans « The Old Guard »). Plus qu’une lettre d’amour au 7ème art, c’est une plongée dans les souvenirs d’enfance de Sam Mendes.
Un tableau intimiste pour Sam Mendes forgé dans ses souvenirs d’adolescent des années 80.
Une belle histoire sensible et attachante, menée par un brillant trio d’acteurs (avec un Colin Firth un peu moins dans la lumière) même si le scénario n’est pas de ceux qui font gagner des points.
8. « Les Trois Mousquetaires – d’Artagnan » de Martin Bourboulon :
On devait souligner la prise de risque et le retour réussi des célèbres mousquetaires du roi au cinéma.
Premier chapitre d’un diptyque tiré du roman d’Alexandre Dumas, « Les Trois Mousquetaires : d’Artagnan » renoue après presque soixante ans d’attente avec le film français de cape et d’épée. Signé Martin Bourboulon (« Papa ou maman », « Eiffel »), le film s’est offert le plus gros budget français de l’année avec 72 millions d’euros soit plus que l’« Astérix » de Guillaume Canet ! Il s’agit de la trente septièmes adaptation de l’œuvre littéraire et celle-ci est porté par un joli quatuor d’acteurs français : Vincent Cassel incarne Athos, Comte de La Fère, Romain Duris est Aramis, Pio Marmaï, Porthos et François Civil endosse le pourpoint de d’Artagnan.
Dans ce premier chapitre, nous attendions beaucoup de chevauchées, de panache et il y en a. Le réalisateur a utilisé une caméra très immersive pour les combats afin de rendre au plus près la puissance des enjeux mais il a aussi fait la part belle comme dans Eiffel (2021) à des scènes dans des lieux chargés d’histoire tels que Les Invalides, Le Louvre, la citadelle de Saint-Malo, les Châteaux de Chantilly, Fontainebleau et de Saint Germain-en-Laye de superbes écrins historiques que seule la France peut offrir !
Un film historique plutôt réussi et maîtrisé qui se donne le temps (plus de 4h au total des deux chapitres) et les moyens (8 mois de tournage) pour magnifier ses héros !
7. « Winter Break » d’Alexander Payne :
Pressenti dans la course aux Oscars en 2024, « Winter Break » est une comédie douce-amère au style rétro est le succès inattendu de cette fin d’année. Porté par l’éternel second-rôle Paul Giamatti, le huitième long-métrage d’Alexander Payne se démarque des habituels récits sur l’esprit de Noël en s’intéressant, une fois n’est pas coutume, aux oubliés du réveillon.
À une époque dominée par les franchises et les blockbusters, « Winter Break » nous montre qu’il y a encore la place pour un cinéma authentique et réfléchi, dans la pure lignée de ce qui se faisait dans les années septante à l’apogée du nouvel Hollywood.
Porté par un scénario limpide, une mise en scène élégante et des acteurs époustouflants, « Winter Break » est sans conteste l’une des plus belles réussites de l’année qui se conclut. Un film tout en douceur, fondant et croustillant, qui se déguste comme une bûche de Noël, sans pour autant déborder de bons sentiments qui l’aurais rendu indigeste.
6. « Migration » de Benjamin Renner :
Après « Les Minions », « Tous en scène » ou le récent « Super Mario Bros », Illumination nous propose son nouveau film : « Migration » de Benjamin Renner.
Une migration qui tourne au very bad trip version Illumination ! C’est enlevé, amusant et surtout passionnant jusqu’au dénouement.
Construit sur un principe simple, un casanier, un brin peureux, est poussé par sa moitié, pétrie de bon sens, (qui a dit bête comme une oie ?) à sortir de sa zone de confort et à entreprendre une migration puis se découvre un profil de héros emplumé.
Une très jolie surprise que vous ne devez pas manquer pour les fêtes tant les thèmes proposés parleront à tous, petits et grands.
5. « Le Règne Animal » de Thomas Cailley :
« Le Règne animal » est le second film de Thomas Cailley après l’excellent « Les Combattants ». Esthétiquement réussi, il utilise la science-fiction pour aborder des préoccupations écologiques et humaines très actuelles.
Porté par le chevronné Romain Duris et la révélation Paul Kircher dans un duo père-fils des plus convaincants, « Le Règne animal » suscite la curiosité de par l’originalité de son sujet. Il tend à prouver que le cinéma français n’a rien à envier à son homologue américain quand il se donne les moyens de ses ambitions, notamment au niveau des effets-spéciaux.
Un film touchant qui croit encore que l’humain est foncièrement bon. Mariant avec brio une multitude de thèmes, Thomas Cailley signe un joli conte sur l’acceptation, le passage à l’âge adulte, la rédemption. Un film qui s’appuie sur une histoire signée Pauline Munier, un solide casting et des effets spéciaux réussis.
« Le Règne animal » est un film mutant : entre drame familial intimiste aux allures de blockbuster, et thriller teinté de comédie.
4. « The Fabelmans » de Steven Spielberg :
« The Fabelmans » est un long-métrage intimiste largement inspiré par l’enfance de Steven Spielberg qui nous replonge dans l’Amérique des sixties, celle de tous les rêves, de tous les possibles…
Toujours porté par la mise en scène élégante et organique de tonton Steven, « The Fabelmans » est une ode à l’enfance, à son esprit de création et son imagination à travers un superbe travail sur les ombres et la lumière qui rend un brillant hommage au Septième Art. Un travail d’orfèvre toujours soutenu par les mélodies envoûtantes de son acolyte de toujours, John Williams, Spielberg nous transporte, nous émeut grâce à des comédiens touchants et délicats qui nous immergent parfaitement dans une fable généreuse et humble.
Pour son trente-sixième long-métrage, Steven Spielberg y évoque sa passion pour le cinéma et les quelques tourments de son enfance, particulièrement ceux liés à ses parents, un couple aimant mais mal assorti. Un retour aux sources particulièrement réussi !
3.« Babylon » de Damien Chazelle :
Le réalisateur Oscarisé Damien Chazelle nous revenait avec « Babylon », une incroyable fresque cinématographique nommée aux Golden Globes et aux Oscars portée par un casting incroyablement talentueux : l’australienne Margot Robbie (« Scandale » & « The Suicide Squad ») campe avec une énergie électrisante la jeune et ambitieuse Nellie LaRoy, Brad Pitt est sublime et touchant en Jack Conrad, un acteur star aux premiers temps du muet.
Damien Chazelle, plus jeune réalisateur oscarisé (en 2017 pour « La La Land ») démontre une fois encore toute sa maestria tant dans les scènes oniriques que dans ses évocations des grands tournages du muet.
Un film inclassable, presque incotable aussi car autant les amateurs et les connaisseurs de l’histoire du cinéma vont l’encenser autant d’autres vont le trouver outrancier, à fortiori s’ils vont le voir sur un petit écran.
Un objet cinématographique très identifié donc, mené tambour battant sur la fantastique musique de Justin Hurwitz injustement boudée aux Oscars !
2. « Killers of The Flower Moon » de Martin Scorsese :
« Killers of the Flower Moon », marque le retour de Martin Scorsese accompagné de ses deux Muses, Leonardo DiCaprio & Robert De Niro soutenu par la performance hallucinante de Lily Gladstone. Un western noir qui relate de manière à peine romancée une terrible histoire survenue dans les années 1920 dans l’État d’Oklahoma.
En signant cette fresque historique violente, crépusculaire et glaçante, Scorsese est très loin de se reposer sur ses lauriers, 47 ans après sa Palme d’Or pour Taxi Driver. Sur fond de crimes contre les Indiens Osages dans l’Oklahoma des années 1920, le cinéaste questionne l’histoire des Etats-Unis et, bien au-delà, notre propre monde, avec une étonnante modernité, tant notre rapport à l’immigration, la colonisation, l’avilissement de l’autre et plus prosaïquement notre avidité de pouvoir et d’argent, est un sujet qui peuple (et gangrène) notre quotidien, sans que nous n’ayons jamais vraiment pu tirer les leçons de l’histoire…
Un film au choix courageux : celui de rappeler à la conscience collective, cette histoire d’une série de crimes parmi les plus sordides commis par les colonisateurs blancs envers des amérindiens pour l’appât du gain.
1.« Oppenheimer » de Christopher Nolan :
3 ans après un « TENET » qui avait divisé, Christopher Nolan faisait son grand retour dans les salles obscures en juillet avec « Oppenheimer » film sur le projet Manhattan et le père de la Bombe atomique basé sur le livre « American Prometheus » de Bird et Sherwin, l’ouvrage qui a le mieux cerné les odyssées personnelle et politique de Robert Oppenheimer (1904-1967), sa contribution à la technologie des armes, sa vie de famille et les démons personnels qui l’ont poursuivi toute sa vie.
Une œuvre soutenue en grand partie par des habitués du cinéaste d’« Interstellar » de Cillian Murphy en passant par Matt Damon, Gary Oldman, Matthew Modine, Kenneth Branagh et les nouveaux venus Emily Blunt, Robert Downey Jr, Florence Pugh…
« Oppenheimer » est un film à la fois éprouvant, angoissant et tragique dans son traitement d’un homme qui a tout donné à son pays pour être ensuite trainé dans la boue et devenir un martyr.
Christopher Nolan prouve une fois de plus qu’il est à l’aise dans tous les genres et qu’il continue d’expérimenter son cinéma avec un biopic solide, percutant, marquant et lourd de sens comme le dernier plan du film le laisse suggérer.
Un uppercut qui nous explose à la tête tel un noyau de plutonium !
Et après ? 2024 s’annonce comme l’année des suites et du retour de certains grands noms !
Nous avons terminé l’année avec le très agréable « Winter Break » d’Alexander Payne et nous la commencerons avec « Argylle » de Matthew Vaughn, « Civil War » d’Alex Garland, le grand retour de Michael Mann avec son biopic « Ferrari » porté par Adam Driver. On est curieux de découvrir « Nosferatu » de Robert Eggers, « Megalopolis » de Francis Ford Coppola, des favoris aux Oscars comme « Pauvres Créatures » de Yorgos Lanthimos, « Priscilla » de Sofia Coppola ; mais aussi les retours de suites tant attendues comme le « Dune : Partie 2 » de Denis Villeneuve, le « Furiosa: A Mad Max Saga » de George Miller, « Vice Versa 2 » de Kesley Mann, « Galdiator II » de Ridley Scott, « Joker : Folie à deux » de Todd Philipps ou encore « Deadpool III » de Shawn Levy et « A Quiet Place : Day One » de Michael Sarnoski.
Bref, on espère comme toujours une grande année cinéma pour faire déplacer un maximum de spectateurs dans les salles obscures car elles en ont toujours grandement besoin !
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