
Critique de « Interstellar » (2014) – « Vers l’infini et au-delà ! »
« Interstellar » est un film qui promettait de la science-fiction révolutionnaire et inégalable. Et on peut dire que Christopher Nolan réussit son pari !
Un biopic détonnant !
3 ans après un « TENET » qui avait divisé, Christopher Nolan fait son grand retour dans les salles obscures avec « Oppenheimer » soutenu en grand partie par des habitués du cinéaste d’« Interstellar » de Cillian Murphy en passant par Matt Damon, Gary Oldman, Matthew Modine, Kenneth Branagh et les nouveaux venus Emily Blunt, Robert Downey Jr, Florence Pugh…
« Oppenheimer » est-il la bombe estivale tant attendue du Box-Office et s’inscrit-il encore plus dans la filmographie d’un auteur toujours aussi complexe et surprenant ?
Mettez vos lunettes de protection, nous plongeons dans le projet Manhattan !
Synopsis :
En 1942, convaincus que l’Allemagne nazie est en train de développer une arme nucléaire, les États-Unis initient, dans le plus grand secret, le “Projet Manhattan” destiné à mettre au point la première bombe atomique de l’histoire. Pour piloter ce dispositif, le gouvernement engage J. Robert Oppenheimer, brillant physicien, qui sera bientôt surnommé “le père de la bombe atomique”. C’est dans le laboratoire ultra-secret de Los Alamos, au cœur du désert du Nouveau-Mexique, que le scientifique et son équipe mettent au point une arme révolutionnaire dont les conséquences, vertigineuses, continuent de peser sur le monde actuel…
En un peu plus de 20 ans de carrière, Christopher Nolan a réussi à se construire une filmographie ambitieuse et cohérente. Le metteur en scène braque sa caméra sur la part sombre des êtres ; même ceux qui nous veulent du bien et son dernier sujet, Julius Robert Oppenheimer, le père de la bombe atomique en est à nouveau un exemple parfait !
Le cinéaste de « Dunkerque » a toujours été fasciné par les personnages complexes et a surtout toujours fait preuve d’une grande maîtrise de sa narration. Une fois de plus, Christopher Nolan sort le spectateur de sa zone de confort tout en déjouant les codes dès son introduction. Un plan resserré sur le visage de son personnage dramatique pour planter le décor.
Le metteur en scène décide de ne pas prendre le spectateur par la main et tort les codes du biopic classique en transformant son récit en course contre la montre, en faux film de casse, en thriller géopolitique aux ambitions monstres pour mieux nous dépeindre les enjeux politiques, sociaux et psychologiques qui vont conduire un homme à offrir à l’humanité le pouvoir de s’autodétruire…
Du Nolan à l’écran, point de linéarité, des allers et retours (très souvent en noirs et blancs) pour saisir toute la complexité d’un génie torturé incarné avec brio par un Cillian Murphy en symbiose totale avec son réalisateur.
Ici point de physique, ni de mécanique quantique, ni d’énigmes ou de retournements de situations comme dans « Memento », « Inception » ou « Interstellar », au contraire il est ici question des responsabilités, des remords et du destin de l’humanité qui repose sur les épaules d’un homme brillant mais trop honnête et pas en phase avec son environnement.
Le casting est brillant, la musique de Ludwig Göransson nous immerge et nous déstabilise autant que les images d’Hoyte Van Hoytema, le montage sonore et la fluidité du récit. Oui c’est long trois heures et ce n’est certainement pas le plus grand film de son auteur mais « Oppenheimer » en vaut le coup, il vous mettra à l’épreuve, vous déboussolera et imprégnera votre esprit longtemps après que les lumières de la salle se soient rallumées.
« Oppenheimer » est un drame historique complexe, incroyablement détaillé au rythme implacable ainsi qu’une expérience traumatisante…
Malgré une longueur certaine qui alourdi l’ensemble et notre esprit, « Oppenheimer » est un film à la fois éprouvant, angoissant et tragique dans son traitement d’un homme qui a tout donné à son pays pour être ensuite trainé dans la boue et devenir un martyr.
Christopher Nolan prouve une fois de plus qu’il est à l’aise dans tous les genres et qu’il continue d’expérimenter son cinéma avec un biopic solide, percutant, marquant et lourd de sens comme le dernier plan du film le laisse suggérer.
Un uppercut qui nous explose à la tête tel un noyau de plutonium !
Une note qui reflète assez bien notre dilemme, « Oppenheimer » nous a hanté pendant de longues heures après son visionnage de par son impact moral ; même au moment de rédiger cette chronique, il continue d’imprégner notre esprit.
Est-ce que ce n’est pas là, la marque d’un grand film ? L’avenir nous le dira ! Toujours est-il que Christopher Nolan parvient encore une fois à réaliser une « Inception » sur nous ! L’empreinte d’un vrai cinéaste.
On ne saurait trop vous conseiller de découvrir « Oppenheimer » sur grand écran plutôt que dans votre salon car cela se ferait aux dépens d’une expérience sonore (la musique est sublime) immersive exceptionnelle et déstabilisante…
Christopher Nolan a, semble-t-il, décidé de faire profiter chaque thème du cinéma de sa vision personnelle. Après avoir donné, avec succès, sa version du Chevalier Noir (« The Dark Knight » en 2008), s’être confronté à Stanley Kubrick (pionnier de la SF 2001 l’Odyssée de l’espace) avec « Interstellar » en 2014, re-documenté la seconde guerre mondiale avec « Dunkerque » en 2017, le voici qui s’attaque à une biographie avec « Oppenheimer » !
Basé sur « American Prometheus » National Book Critics Circle Award et Duff Cooper Prize en 2005, l’ouvrage qui a le mieux cerné les odyssées personnelle et politique de Robert Oppenheimer (1904-1967), sa contribution à la technologie des armes, sa vie de famille et les démons personnels qui l’ont poursuivi toute sa vie.
Le livre de Bird et Sherwin présente les débats politiques, militaires et scientifiques du début du vingtième siècle auxquels Julius Robert Oppenheimer a participé, tout comme ses dilemmes moraux nés des expériences de fission nucléaire. Cette œuvre remarquable sur un homme certes imparfait mais brillant, Bird et Sherwin en ont transmis 26 000 documents constitutifs de leur travail à la Bibliothèque du Congrès.
Sur cet énorme socle, le réalisateur a construit un film dense, audacieux et ambitieux nourri des excellentes performances de Cillian Murphy, Matt Damon, Emily Blunt, Robert Downey Jr. Une fois encore Nolan réussit l’exploit de conjuguer film d’auteur et œuvre grand public avec cette fois le souci de parler de mécanique quantique, de théories mathématiques sans lasser ou perdre le spectateur (contrairement aux algorithmes complexes capables d’inverser le temps dans « TENET »).
La partition musicale aux accents parfois tonitruants (pour ne pas dire explosifs) a été confiée à Ludwig Göransson, immersive et déstabilisante, elle accompagne à merveille les images signées du directeur de la photo Hoyte Van Hoytema et contribue à la fluidité d’un long voyage de trois heures qui s’engrammera à jamais en vous.
Peut-être n’est-ce pas le meilleur film de Nolan même si une fois encore il fait preuve de son humanisme, de sa grande maîtrise et de ses qualités de détournements des dispositifs narratifs mais c’est un biopic foisonnant dont vous ne sortirez pas intact.
Oppenheimer aurait dû obtenir un 8 mais à vouloir coller au plus près à l’ouvrage de Kai Bird et Martin J. Sherwin (1937-2021) qui ont remarquablement retracé le parcours du scientifique récompensés du prix Pulitzer de la biographie en 2006, Christopher Nolan n’a pas osé trancher laissant se dérouler durant 2h30 les trois arcs narratifs avant de les clorent dans une excellente dernière demi-heure (les meilleures scènes d’Emily Blunt) menant à une émouvante et angoissante conclusion.
Julien & Yves Legrand – Le 18 juillet 2023
Sources Photos :
© 2023 Sony Pictures Belgium
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