Publicités

Tout feu, tout flamme !

Le Règne du feu

Christian Bale et Matthew McConaughey, deux acteurs caméléons oscarisés qui affrontent des énormes dragons dans un paysage post-apocalyptique digne de « Mad Max », c’était le pitch de départ du « Règne du feu » de Rob Bowman.

Un blockbuster gonflé à plus de 60 millions de dollars et qui ne rapporta que 82 millions de dollars dans le monde.

Comment expliquer ce four malgré ce statut de gros film d’action du début des années 2000 et ce relatif oubli dans la filmographie de ces deux acteurs stars ?

Retour sur un film pas si fumeux que ça et pourtant !

Critique « Le Règne du feu » (2002) : Tout feu, tout flamme ! - ScreenTune
© 2002 - Walt Disney Studios - Spyglass Entertainment Group

Synopsis :

A Londres, en 2008, le jeune Quinn accompagne sa mère sur un chantier. Celle-ci supervise la construction de tunnels pour le nouveau tracé du métro. Lors du creusement, une paroi s’effondre, révélant un gouffre à la profondeur illimitée. La mère de Quinn descend dans le tunnel, mais une immense colonne de feu s’échappe du trou et tue tous ceux qui se trouvent sur son passage. Resté à l’entrée de l’excavation, le garçon assiste, médusé, à ce tragique événement. Un dragon jaillit alors du tunnel.

Vingt ans plus tard, les dragons règnent en maîtres sur une planète en ruines où chaque être humain ne représente pour eux qu’un mets de choix. Quinn est chargé de les éliminer et d’assurer la survie de sa petite communauté. Mais le combat semble perdu d’avance. Un jour, Van Zan, un militaire américain, fait son apparition et prétend connaître le moyen de tuer ces créatures cracheuses de feu.

  • Un scénario tuer dans l’œuf :

À l’origine selon les dires du réalisateur Rob Bowman, « Le Règne du feu » ressemblait plus à une sorte d’« Indendance Day » beaucoup plus centré sur les dragons que sur la survie des personnages. Quinn incarné par Christian Bale était plus effacé et Van Zan interprété par McConaughey était encore plus caricatural que dans la version finale.

Rob Bowman qui a surtout fait ses armes sur la série « X-Files » en réalisant plus de 33 épisodes ainsi que le film éponyme désirait plus se focaliser sur la lutte des survivants dans ce monde apocalyptique réduit en cendres.

Critique « Le Règne du feu » (2002) : Tout feu, tout flamme ! - ScreenTune
Photo prise par Jonatha Hession © 2002 - Walt Disney Studios - Spyglass Entertainment Group

Pourtant, le plus gros défaut de l’œuvre n’est autre que son scénario. Écrit par Matt Greenberg (la dernière adaptation de « Simetierre ») et par le duo Gregg ChabotKevin Peterka (dont il s’agit de la seule incursion scénarisitique au cinéma), l’idée de base est ambitieuse avec ces dragons en hibernation sous la terre qui seraient responsables de l’extinction des dinosaures et de l’ère glaciaire.

Prometteur et très inspiré de Lovecraft mais très vite cassé dans l’œuf par le traitement de ses personnages, de ses enjeux et de ses rebondissements. C’est bien simple passé une introduction intéressante, le film de Rob Bowman ne sait plus sur quel pied danser. Grosse bagarre virile entre les deux têtes d’affiches, un raccourci scénaristique un peu (« trop ») facile comme quoi il n’y a qu’un dragon mâle pour féconder les autres, un personnage féminin fonction incarné par Izabella Scorupco (« Goldeneye ») aux côtés de personnages principaux stéréotypés et un combat final sans surprise.

Critique « Le Règne du feu » (2002) : Tout feu, tout flamme ! - ScreenTune
Photo prise par Jonatha Hession © 2002 - Walt Disney Studios - Spyglass Entertainment Group

Christian Bale tente tant bien que mal de donner de l’épaisseur à son personnage, à la base le futur acteur de « Batman Begins » voulait même apparaître maigre afin d’immortaliser à l’écran le désespoir et la fragilité de cet univers. Cependant en voyant débarquer Matthew McConaughey tout en muscles, Bale a très vite filé à la salle de sport.

McConaughey parlons-en d’ailleurs, habitué à l’époque aux comédies romantiques malgré les très bons « Contact » de Robert Zemeckis et « Amistad » de Spielberg sur son CV, cabotine ici comme jamais. Tantôt macho et égocentrique, il offre une performance aussi ridicule que le nom de son personnage.

Critique « Le Règne du feu » (2002) : Tout feu, tout flamme ! - ScreenTune
Photo prise par Jonatha Hession © 2002 - Walt Disney Studios - Spyglass Entertainment Group

Pas étonnant donc que « Le Règne du feu » n’ait pas eu le succès escompté et n’ait pas été reconnu comme un film culte au cours des deux dernières décennies.

D’une part, parce que ses deux acteurs principaux, Christian Bale et Matthew McConaughey, se sont imposés comme des valeurs sûres et de véritables caméléons avec des œuvres bien plus marquantes dans les années suivantes. « The Machinist » en 2004, la trilogie « The Dark Knight » de Christopher Nolan de 2005 à 2012, « The Fighter » pour lequel il décroche l’Oscar du « meilleur acteur dans un second rôle », « American Bluff » ou encore « Vice » pour le premier et « Comment se faire larguer en 10 leçons », « Tonnerre sous les tropiques », « La Défense Lincoln », « Mud », « Dallas Buyer Club » pour lequel il décroche l’Oscar du « meilleur acteur » ainsi qu’« Interstellar » pour le second ; tous ces films ont fini par éclipser « Le Règne du feu » de la filmographie de ces deux têtes d’affiche.  

D’autre part, « Le Règne du feu » est sorti sous la marque Touchstone Pictures, aujourd’hui disparue, division des studios Disney autrefois chargée de sortir des films plus adultes. La maison de Mickey ne fait désormais plus grand-chose aujourd’hui pour améliorer le profil des films Touchstone, même ceux qui ont eu du succès, comme « Qui veut la peau de Roger Rabbit », « Armageddon » ou « Signes », et il n’est donc pas surprenant que la Maison aux grandes oreilles ait laissé le film de Rob Bowman partir en cendre.

Critique « Le Règne du feu » (2002) : Tout feu, tout flamme ! - ScreenTune
© 2002 - Walt Disney Studios - Spyglass Entertainment Group
  • Des dragons pas aussi à bout de souffle que ça ! :

Malgré certains aspects négatifs, « Le Règne du feu » n’a pourtant rien à envier à certaines des productions cinématographiques de ces dernières années.

Ce qui fait du film de Rob Bowman un petit plaisir coupable de cinéphile c’est tout d’abord, comme dit précédemment, son idée de base. Un peu emprunté à H.P. Lovecraft et son mythe des grands anciens avec ces dragons endormis près à dominer le monde dès leur réveil, le film offre une belle identité visuelle à ces gros lézards volants. Même si les effets spéciaux piquent parfois aux yeux aujourd’hui, les dragons restent bestiaux, féroces et assez impressionnants.

Ensuite, les décors post-apocalyptiques sont soignés et bien pensés. Soulignons le travail sur l’ambiance qui nous immerge directement dans ces paysages désolés remplis de fumés de cendres grâce au travail minutieux d’Adrian Biddle (« Aliens, le retour »). Un désert gris et inhospitalier qui renforce l’immersion et qui aurait mérité plus d’approfondissement aux dépens de l’action à outrance.

Critique « Le Règne du feu » (2002) : Tout feu, tout flamme ! - ScreenTune
Photo prise par Jonatha Hession © 2002 - Walt Disney Studios - Spyglass Entertainment Group

Le plus bel exemple et sans aucun doute l’apparition de cette architecture médiévale irlandaise au profit d’un scénario post-apocalyptique. L’histoire se déroule en 2020, les dragons ont ravagé la Terre au point que les survivants se cachent dans les ruines d’un château médiéval.

Un détail astucieux qui donne l’impression que le monde du « Règne du feu » est revenu au Moyen-Âge tandis que les paysages environnants sont là pour nous rappeler que nous sommes dans un monde qui ressemble plus au « Fils de l’Homme » qu’à « Cœur de dragon ». Le choix et le mélange des décors offre ainsi au « Règne du feu » une identité attrayante et certaine.

Critique « Le Règne du feu » (2002) : Tout feu, tout flamme ! - ScreenTune
Photo prise par Jonatha Hession © 2002 - Walt Disney Studios - Spyglass Entertainment Group

Finalement, comparé à l’ère du blockbuster moderne, « Le Règne du feu » ne ferait pas tache dans les productions actuelles. Non dénué de choix artistiques forts dans ses décors et d’une idée de base au potentiel certain, le film de Rob Bowman mériterait un peu plus de reconnaissance aujourd’hui.

Généreux et cabotin, notamment Matthew McConaughey se jetant sur un dragon hache la première, « Le Règne du feu » est un petit plaisir coupable et une bonne série B offrant une vision bestiale des dragons qui crachent du feu, volent et dévorent des humains.

Un œuvre qui n’a jamais voulu s’élever au niveau de qualité qui a défini les meilleurs blockbusters des années 2000, comme « Spider-Man 2 » ou « Le Seigneur des Anneaux : Le retour du roi ». Cependant, pour un film qui a fait un bide spectaculaire en 2002 et qui a disparu des radars de la pop culture depuis, « Le Règne du feu » a réussi à perdurer dans la mémoire collective comme œuvre amusante et comme un tremplin pour ses deux acteurs principaux.

Si vous avez hésité à vous lancer dans ce film, il est temps d’arrêter de faire le dragon en hibernation et de donner au « Règne du feu » une chance de vous convaincre.

Note : 6/10

Julien Legrand – Le 21 août 2022

Sources Photos : 

  • © 2002 – Walt Disney Studios – Spyglass Entertainment Group

Vous pourriez aussi aimer :

Critique « Le Mans 66 » (2019) : Ford Focus

« Le Mans 66 » revient sur l’affrontement mythique entre le constructeur automobile américain et l’écurie italienne pendant la célèbre course des 24h du Mans.
Auréolé de plusieurs nominations aux Oscars, « Le Mans 66 » est porté par son duo d’acteurs confirmés (Matt Damon et Christian Bale). Verdict.

Lire plus »

contact.screentune@gmail.com