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La Croisière s’amuse (pas) !

Délivrance

« Délivrance »,, le cinquième long-métrage de John Boorman, a 50 ans !

Le cinéaste britannique (né en 1933) réalise son premier long-métrage en 1965, « Catch us if can » (« Sauve qui peut »), après avoir fait ses armes à la télévision et travaillé comme critique de cinéma. Le succès est au rendez-vous et lui permet de rejoindre les Etats-Unis pour y réaliser « Point Blank » (« Le Point de non-retour » en 1967), d’après le roman de Donald Westlake, avec Lee Marvin et Angie Dickinson, puis « Hell in The Pacific » (« Duel dans le Pacifique » en 1968) avec Lee Marvin et Toshirō Mifune, deux films qui lui assurent une belle notoriété. « Leo The Last » (« Léo le dernier » en 1970) marque ensuite son retour en Europe et met en scène Marcello Mastroianni.

Le film permet au réalisateur de décrocher le Prix de la mise en scène au festival de Cannes.

Pour « Délivrance », Boorman s’inspire du roman de James Dickey, qui en signe le scénario. Le réalisateur avait brûlé la politesse à Sam Peckinpah, intéressé par son adaptation, en acquérant les droits du livre avant lui.

Critique « Délivrance » (1972) : La Croisière s’amuse (pas) ! - ScreenTune
© 1972 Warner Bros.

Synopsis :

Quatre Américains de classe moyenne, Ed Gentry, Lewis Medlock, Bobby Trippe et Drew Ballinger décident de consacrer leur week-end à la descente en canöe d’une impétueuse rivière située au nord de la Géorgie. Ils envisagent cette expédition comme un dernier hommage à une nature sauvage et condamnée par la construction d’un futur barrage. Mais les dangers qu’ils affronteront ne proviendront pas uniquement des flots tumultueux de la rivière…

« Délivrance », nous plonge dans une descente aux enfers en compagnie de quatre Américains de classe moyenne. Ed (Jon Voight), Lewis (Burt Reynolds), Bobby (Ned Beatty) et Drew (Ronny Cox) ont décidé de descendre en canoë la rivière Cahulawassee (en réalité la Chattooga en Géorgie), située dans une région isolée, vouée à devenir inaccessible suite à la construction d’un barrage entrainant la création d’un lac artificiel. Si l’intention des quatre potes prend source dans une volonté de rendre un dernier hommage à une nature sauvage condamnée par l’homme, le danger ne surgira pas seulement des flots tumultueux, mais aussi d’une rencontre avec quelques habitants de cette région rurale aux manières brutales et bestiales… la sauvagerie des hommes n’étant finalement qu’à l’image de celle de la nature qui les entoure…

Le calme et la convivialité des premiers moments partagés face à la beauté des paysages idylliques, magnifiée grâce au travail du grand directeur photo Vilmos Zsigmond (Rencontres du troisième type, Voyage au bout de l’enfer, Blow Out, Le dahlia noir), fait rapidement place à des situations cauchemardesques….

Critique « Délivrance » (1972) : La Croisière s’amuse (pas) ! - ScreenTune
© 1972 Warner Bros.

Cinquante années après sa sortie, le film conserve tout son impact grâce au climat nerveux et oppressant qu’il parvient à inspirer grâce à la qualité de son écriture et de son montage, avec, en point d’orgue, la crudité de la terrible scène de viol du personnage incarné par Ned Beatty

Tous les comédiens sont excellents. Le film permit de consolider la carrière de Burt Reynolds, jusque-là surtout exploité à la télévision (et qui sera nommé bien plus tard pour un Oscar avec « Boogie Nights » en 1982), ainsi que celle de Jon Voight, révélé trois ans plus tôt dans « Midnight Cowboy » (« Macadam cowboy ») de John Schlesinger (1969) et qui lui valut sa première nomination à l’Oscar du meilleur acteur, statuette qu’il obtiendra finalement pour « Coming Home » (« Retour ») de Hal Ashby en 1979.

Critique « Délivrance » (1972) : La Croisière s’amuse (pas) ! - ScreenTune
© 1972 Warner Bros.

Si le quatuor de comédiens formé par Reynolds, Voight, Beatty et Cox est des plus convaincants, aucun de ceux-ci ne constituait le premier choix du réalisateur. John Boorman souhaitait à l’origine engager Marlon Brando et Lee Marvin pour les deux rôles principaux, mais ceux-ci furent finalement considérés comme trop âgés pour faire face à des rôles et des scènes très physiques. Jack Nicholson, Gene Hackman et Donald Sutherland furent ensuite envisagés pour le rôle d’Ed, alors que celui de Lewis fut proposé, sans davantage de succès, à Henry Fonda, Charlton Heston ou encore James Stewart.

Critique « Délivrance » (1972) : La Croisière s’amuse (pas) ! - ScreenTune
© 1972 Warner Bros.

À sa sortie, le film récolte globalement de bonnes critiques et obtient 3 nominations aux Oscars et 5 autres aux Golden Globes. Il remporte également un beau succès public, ouvrant au cinéaste la voie à de nombreux projets, et lui permettant d’en concrétiser cinq sur les quinze années suivantes.

Il réalise dans la foulée le post-apocalyptique « Zardoz » (1974), avec Sean Connery et Charlotte Rampling, développé après n’avoir pas pu mener à bien son projet d’adaptation du « Seigneur des anneaux » de J. R. R. Tolkien, avant de livrer avec « L’exorciste 2 : L’hérétique », en 1977), une suite peu réussie du chef d’œuvre de William Friedkin. Boorman livrera ensuite sa vision de la légende du Roi Arthur avec l’épique « EXCALIBUR » (1981), devenu un film-culte malgré son accueil critique mitigé. Le film, doté d’un casting audacieux pour ses premiers rôles (Nigel Terry, Helen Mirren, Nicol Williamson, Cherie Lunghi, Nicholas Clay, Paul Geoffrey), est aussi l’occasion de donner un coup d’accélérateur à la carrière de trois comédiens campant des rôles secondaires : Liam Neeson, Patrick Stewart et Gabriel Byrne.

Critique « Délivrance » (1972) : La Croisière s’amuse (pas) ! - ScreenTune
John Boorman (au milieu) sur le tournage avecJon Voight (à gauche) et Burt Reynolds (à droite) - © 1972 Warner Bros.

Avec son film suivant, « La forêt d’émeraude » en 1985, le réalisateur offrira aux spectateurs un récit d’aventures palpitant, nourri par la relation entre un père (Powers Boothe) et son fils (Charley Boorman, le fils du cinéaste), au cœur d’un scénario laissant une large place aux valeurs humanistes et environnementales qui lui sont chères.

L’autobiographique « Hope and Glory » (1987) clôturera les quinze années qui suivirent « Délivrance », avant que la carrière de John Boorman, bien que parsemée de films intéressants (« RANGOON », « THE GENERAL », « THE TAILOR OF PANAMA », « COUNTRY OF MY SKULL »…), ne s’essouffle quelque peu… Son dernier film, « QUEEN AND COUNTRY », date de 2014.

Critique « Délivrance » (1972) : La Croisière s’amuse (pas) ! - ScreenTune
© 1972 Warner Bros.

Quant à « Délivrance », film survivaliste où la nature humaine est mise à rude épreuve (comme les nerfs des spectateurs) lorsque l’instinct de survie naît face à l’animalité et la violence aveugle, il reste aujourd’hui encore un film de référence qui démontre tout le savoir-faire du réalisateur et l’un des maillons les plus importants de son œuvre visionnaire…

Note : 8/10

Vincent Legros – Le 21 mai 2022

Sources Photos :

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