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Chair à canon !

À l'Ouest, rien de nouveau

Nouvelle adaptation du roman pacifiste du même nom d’Erich Maria Remarque, après notamment celle de 1930, « A l’Ouest, rien de nouveau » nous plonge dans l’enfer des tranchées de la Première Guerre Mondiale. Dans la lignée de « 1917 », le film met en lumière avec une relative sobriété de jeunes soldats allemands, insouciants et patriotes, qui vont découvrir l’horreur des combats.

Cette production germano-américaine porte un regard cru et acerbe sur la guerre et ses atrocités. La réalisation se focalise sur les derniers instants du conflit, alors que le haut commandement tarde à signer l’armistice par orgueil et que les soldats continuent de se faire massacrer, envoyés au front par des généraux despotiques, refusant d’admettre une défaite pourtant inéluctable.

Sélectionné pour représenter l’Allemagne aux prochains Oscars, le long-métrage porté entre autres par Daniel Brühl à des atouts à faire valoir. Notre Verdict !

Critique: « A l'Ouest, rien de nouveau  » (2022) : Chair à canon ! - ScreenTune
© 2022 Netflix, Inc.

Synopsis :

L’histoire poignante d’un jeune soldat allemand sur le front occidental pendant la Première Guerre mondiale. En première ligne, Paul et ses camarades voient l’euphorie initiale se muer en désespoir et en épouvante quand ils se retrouvent à défendre leurs vies au fond des tranchées.

Au moment de mettre en images ce pamphlet anti-guerre, le réalisateur allemand Edward Berger ne fait aucune concession, il montre dès les premières scènes l’inhumanité de la chose en filmant les corps jonchants le sol, les dépouilles défroquées pour en récupérer les vêtements qui, par une série d’ellipses, sont empaquetés, transportés dans des manufactures, lavés, recousus, puis redistribués aux nouveaux engagés.

Critique: « A l'Ouest, rien de nouveau  » (2022) : Chair à canon ! - ScreenTune
© 2022 Netflix, Inc.

C’est en filmant des éléments du quotidien dans ce contexte ô combien tragique que Berger témoigne de l’horreur que représente cette guerre. Ici nul besoin d’effusion de sang, ni de corps qui explosent pour  dépeindre l’atrocité. Au lieu de cela, on se focalise sur des détails, des gestes qui peuvent paraître anodins mais qui se révèlent terriblement  explicites.

Des scènes qui démontrent le manque de considération envers les soldats de la part de généraux  qui ne voient là que des numéros, des bestiaux envoyés à l’abattoir. De ces vies sacrifiées, ne subsistent que les plaques d’identifications arrachées de leur cou, suffisent à montrer toute l’ignominie de cette Première Guerre Mondiale.

Critique: « A l'Ouest, rien de nouveau  » (2022) : Chair à canon ! - ScreenTune
© 2022 Netflix, Inc.

La photographie, de grande qualité, accentue le climat d’horreur dans lequel sont plongés ces jeunes hommes. Par un subtil jeu de contrastes bien senti, le spectateur plonge, en même temps que les protagonistes, dans l’enfer des tranchées. Avec la luminosité qui décroit à mesure que l’on approche du coeur de la bataille, le cadrage se resserre sur les visages, l’immersion n’est que plus forte.

On ressent la peur qui assaille les jeunes combattants lorsqu’ils découvrent la réalité du terrain, le désespoir qui se lit dans leur yeux, comme cette larme filmée en gros plan. On a de l’empathie pour ces gamins plein d’euphorie, dont les idéaux sont douchés en moins de deux.

Pour ajouter à ce sentiment d’angoisse, la bande son joue elle aussi un rôle important, notamment avec cette musique puissante, toute en percussions qui accompagne les soldats jusqu’aux tranchées.

Critique: « A l'Ouest, rien de nouveau  » (2022) : Chair à canon ! - ScreenTune
© 2022 Netflix, Inc.

Mais le film ne se contente pas de nous faire vivre la guerre par le prisme des combats, il fait découvrir les soldats  en période de repos, dans un contexte plus “normal », plus lumineux, dans des scènes de camaraderie, de franche rigolade. On les voit discuter de leur vie au pays, de leurs projets une fois la guerre terminée, ce qui accentue encore un peu l’empathie à leur égard. D’autant plus que le film offre ces rôles à de jeunes acteurs inexpérimentés qui tiennent pourtant la baraque.

Le contraste est saisissant entre ces jeunes hommes filmés en groupe soudé et leurs généraux, souvent filmés isolés et seuls, dans la pénombre dans des plans larges qui accentuent l’impression de solitude. Cette différence entre l’union des soldats et la solitude du commandement montre toute l’absurdité du conflit où de vieux gradés envoient de jeunes hommes avec toute la vie devant eux se faire tuer.

Critique: « A l'Ouest, rien de nouveau  » (2022) : Chair à canon ! - ScreenTune
© 2022 Netflix, Inc.

Le contexte de fin de guerre augmente l’impression de gâchis avec des négociations qui n’en finissent pas entre de vieux décideurs français bornés d’un côté et de l’autre, la délégation allemande qui essaye de sauver ce qui peut l’être. Des discussions menées bien au chaud dans un train tandis qu’à quelques centaines de kilomètres de là, des jeunes gens continuent de se faire mettre en charpie dans le froid des tranchées. Des soldats qu’un général despotique refusant de déposer les armes, oblige à se battre jusqu’à l’heure H, juste par fierté mal placée, alors qu’il sait pertinemment la défaite inéluctable.

C’est là toute l’histoire de « A l’Ouest rien de nouveau », critique acerbe et crue de la guerre dans sa propension à faire s’entretuer de jeunes hommes envoyés aux front par des hommes assis confortablement dans leur fauteuil. Le film parvient avec beaucoup d’habileté à nous faire ressentir toute l’horreur à laquelle sont confrontés les soldats, le tout sans avoir recours au gore et au sanglant.

Critique: « A l'Ouest, rien de nouveau  » (2022) : Chair à canon ! - ScreenTune
© 2022 Netflix, Inc.

Moins contemplatif que « 1917 » mais tout aussi prenant, « A l’Ouest rien de nouveau » n’a rien à envier au film de Sam Mendes et mérite tout autant qu’on s’y attarde. Un film de guerre qui n’est pas sans rappeler « Les Sentiers de la gloire » dans le message qu’il délivre et s’inscrit dans la lignée des meilleur films sur la Première Guerre Mondiale, comme son ainé de 1930.

Edward Berger signe une œuvre glaçante et pertinente, il réussit à retranscrire l’horreur de la guerre sans jamais tomber dans la surenchère. Fidèle au propos antimilitariste du roman, il donne à réfléchir sur la barbarie de la guerre où l’on envoie de jeunes hommes se faire tuer pour des causes qui les dépassent.

NOTE :

8 /10

Un excellent film de guerre doublé d’une critique acerbe, le tout porté par une photographie léchée et une bande son prenante. Quelques longueurs sont à noter mais pas de quoi ternir la qualité d’ensemble.

Damien Monami Legros – Le 18 novembre 2022

Sources Photos : 

© 2022 Netflix

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