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L’argent ne dort jamais

Le Loup de Wall Street

Adapter le livre biographique de Jordan Belfort (paru en 2005), star des courtiers des années 90, l’illustration parfaite de l’ascension et de la décadence n’était pas chose aisée.

Quand on regarde la guerre qui s’est déroulée entre Brad Pitt et Leonardo DiCaprio pour l’obtention des droits d’adaptation, ce n’était pas gagné. Les enchères ont finalement été remportées par le second car sa vision du projet était plus en phase avec celle de l’auteur.

Pourtant, le film a bien failli ne pas trouver le chemin des salles obscures car le long métrage était en pré-production lors de la grève des scénaristes en 2007. Le film tombe alors aux oubliettes.

Finalement en 2012, tel un phénix qui renaît de ses cendres et sans la bénédiction des grands studios, le film se réalise quand même avec un budget de 100 millions de dollars. C’est ainsi que Leonardo DiCaprio, également producteur, retrouve pour la cinquième fois son fidèle cinéaste Martin Scorsese.

© 2013 Paramount Pictures.

Résumé : L’argent. Le pouvoir. Les femmes. La drogue. Les tentations étaient là, à portée de main, et les autorités n’avaient aucune prise. Aux yeux de Jordan et de sa meute, la modestie était devenue complètement inutile. Trop n’était jamais assez…

(Allociné)

Alors que vaut ce grand plongeon dans les bas fonds de Wall Street ? Ce qu’on peut dire, c’est qu’à 71 ans Martin Scorsese n’a rien perdu de son talent ; sans aucune retenue il dépeint le portrait d’un homme qui est passé du côté obscur du dollar américain, dans l’ascension grandiloquente d’un jeune courtier parti de rien pour se retrouver au sommet d’un empire. Une œuvre osée, parfois amorale, mais pleine d’audaces, ce “Loup de Wall Street” est un film sulfureux, intense à la limite de l’hilarité par moments, mais aussi cruel au travers de la décadence d’un empire qui s’effondre.

Pour mieux définir la folie qui caractérise son personnage principal, Scorsese donne à son biopic des accents de film noir et fait des emprunts aux films de gangsters. L’apport des scènes parfois dramatiques et l’interpellation du spectateur par Jordan Belfort nous racontant son histoire rendent cohérent cet univers. La réussite du film doit aussi beaucoup à la performance cultissime d’un DiCaprio fou à lier qui lui aurait largement valu un oscar. Il incarne avec brio un Jordan Belfort plus vrai que nature ; entouré d’une distribution de qualité qui donne encore plus de relief à sa performance. La sensuelle Margot Robbie en beauté fatale dans son duo avec DiCaprio fonctionne à merveilles. Jonah Hill qui est à des lieux de ses rôles habituels de ses comédies potaches.

Enfin que dire de la courte performance de Matthew McConaughey qui marque les esprits en si peu de temps.

Photo by Mary Cybulski - © 2013 Paramount Pictures

Le seul défaut qui pourrait freiner certains spectateurs, c’est la durée conséquente du long métrage, presque 3 heures. Pourtant Scorsese arrive à rythmer son film grâce à un montage fluide et à un Leonardo DiCaprioen excellent narrateur, accompagné d’une bande son des plus agréable.

La mise en scène est d’une virtuosité admirable toute en créativité. Le film est généreux dans le spectacle notamment à travers des scènes qui vont rester cultes (la prise du médicament Lemmon 714 en tête).

Le cinéaste dépeint avec une grande lucidité son anti-héros, un monstre de cupidité qui ne recule devant rien pour arriver à ses fins. On retrouve aussi des thèmes chers à la filmographie de Scorsese comme sa fascination pour les truands, les hors-la-loi riches et charismatiques qui ont fait sa renommée. Il y a vraiment dans ce “Loup de Wall Street” la patte du metteur en scène italien comme dans “Casino” ou “Les Affranchis“. C’est un portrait démesuré, comme “Le Scarface” de De Palma, où l’avidité de l’argent transforme tous hommes en drogués assoiffés de dollars.

Photo by Mary Cybulski - © 2013 Paramount Pictures

Ce biopic scorsesien est inventif, décadent, ravageur et provoque par moments l’hilarité du spectateur mais aussi la peur et la réflexion que l’argent ne fait pas le bonheur. Ce n’est pas un chef d’œuvre plus une leçon de cinéma en termes de narration et de prouesse artistique.

 

Note: 8/10

 

Julien Legrand – Le 25 février 2018

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