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Take my breath away !

Top Gun

Des avions, des muscles, des jolies filles, des cascades vertigineuses… Lors de sa sortie en 1986, le phénomène « Top Gun » emporte tout sur son passage dans les salles obscures et consacre Tom Cruise comme une superstar.

Quelle est la recette du film de Tony Scott, alors tout juste auréolé du succès de son premier long métrage « Les Prédateurs » ? Comment expliquer cet engouement certain et sa place de film culte ?

Retour sur un film dont le scénario ne vole pourtant pas très haut et cependant…devenu un incontournable des années 80.

Critique « Top Gun » (1986) : Take my breath away ! - ScreenTune
© 1986 Paramount Pictures

Synopsis :

Jeune prodige du pilotage mais vraie tête brûlée, Pete Mitchell, dit « Maverick », intègre une école réservée à l’élite de l’aéronavale US (« Top Gun »), il y tombe sous le charme d’une instructrice alors qu’il est en compétition pour le titre du meilleur pilote …

« Top Gun » a été un énorme succès lors de sa sortie en 1986 avec plus de 357 millions de dollars au Box-Office pour un budget de seulement 15 millions. Comment expliquer un tel succès ? Comment ce film d’action emblématique a-t-il affecté les forces aériennes (US Air Force et la Navy ?

35 ans plus tard, on voit mal cette suite tardive « Top Gun : Maverick » arriver à faire aussi bien que son illustre aîné.

Critique « Top Gun » (1986) : Take my breath away ! - ScreenTune
© 1986 Paramount Pictures
  • Tom Cruise, pilote malgré lui :

Intense, rapide et bourré d’émotions pour un film d’action, « Top Gun » a été un succès précoce pour Tom Cruise dans le rôle de Maverick, un pilote de F14 téméraire avec un talent pour le pilotage et son besoin insatiable de sensations fortes. Le comédien n’avait alors tourné que dans « Risky Business » et « All the Right Moves », c’est bien ce rôle de pilote intrépide qui le fait passer dans une autre dimension et le transforme en future vedette du Box-Office.

L’acteur n’avait alors qu’une vingtaine d’années et trouve enfin un rôle à la mesure de sa « gueule d’ange ». Le futur héros de la saga « Mission Impossible » a d’ailleurs payé de sa personne durant le tournage dans les cockpits, le comédien s’étant plusieurs fois cogné aux parois de la cabine en ayant pris part à des figures difficiles aux côtés du capitaine de corvette Lloyd « Bozo » Abel.

Dans le film de Tony Scott, le métier de Maverick est perçu comme le travail le plus cool du monde, malgré des moments poignants comme le tragique accident de l’un de ses compagnons, qui laisse entrevoir la dure réalité des entrainements et les risques du métier. Pourtant quelle influence le long métrage au succès phénoménal a-t-il eu sur la véritable école de pilotage et sur les forces aériennes de la marine ?

Critique « Top Gun » (1986) : Take my breath away ! - ScreenTune
© 1986 Paramount Pictures
  • Danger Zone pour l’armée ? :

Pour les forces aériennes de l’armée américaine, le succès de « Top Gun » a soufflé le chaud et le froid en termes d’image, avec cependant plus de positif que de négatif. À sa sortie, le long métrage de Tony Scott connait un succès critique mitigé malgré son engouement populaire au Box-Office.

Avec ses cascades de haut vol, l’irrépressible et amusant « Top Gun » a essentiellement servi de spot publicitaire pour les programmes d’aviation de l’Oncle Sam à une époque où les niveaux d’inscription n’étaient pas très élevés et où la perception du public à l’égard de l’armée américaine était loin d’être unanime, bien que cette nouvelle popularité n’ait pas été sans problèmes.

En effet, l’engouement certain du public pour « Top Gun » a directement contribué à une augmentation de 500 % des demandes d’inscription dans l’armée de l’air, un impact jusqu’alors inédit pour un film grand public.

Critique « Top Gun » (1986) : Take my breath away ! - ScreenTune
© 1986 Paramount Pictures

Bien que n’étant pas directement affiliés à l’organisation, la production du film de « Top Gun » a procédé à des ajustements mineurs dans le scénario pour apaiser les autorités militaires et avoir accès à plus de matériels pour les besoins du tournage.

C’était et cela reste une pratique courante pour de nombreuses productions hollywoodiennes à grande échelle, dont les scénarios doivent être approuvés par le Pentagone avant de pouvoir utiliser du matériel militaire au cours de la production.

Parmi ces changements, les producteurs ont décidé de transformer l’histoire amoureuse entre Maverick et Charlie, une ingénieure civile plutôt qu’une militaire, les relations amoureuses entre collègues étant interdites à l’époque.

Ces changements ont été payants pour la marine américaine en particulier, qui a installé des stands d’inscription lors de certaines projections de « Top Gun » pour profiter de la popularité et recruter des cinéphiles directement à la sortie des cinémas.

Critique « Top Gun » (1986) : Take my breath away ! - ScreenTune
© 1986 Paramount Pictures
  • Fiction et réalité ne font pas bon ménage :

Néanmoins, ce n’est pas parce que les spectateurs ont été séduits par les incroyables séquences de vols filmées par Tony Scott que tous étaient préparés à la réalité du terrain militaire.

De nombreuses recrues n’étaient pas faites pour l’armée, comme le prouve une règle énoncée par l’ancien pilote Guy « Bus » Snodgrass. Selon Snodgrass, les recrues étaient (et sont toujours) régulièrement sanctionnées pour avoir cité le film, toute réplique de « Top Gun » coûtant 5 dollars par citation.

Même si le film a permis à de nombreuses personnes de rejoindre l’US Air Force, il a également provoqué une grande frustration chez les officiers qui les formaient et qui avaient besoin que les recrues fassent la part des choses entre la réalité et la fiction avant de prendre les commandes d’un avion de chasse.

Critique « Top Gun » (1986) : Take my breath away ! - ScreenTune
© 1986 Paramount Pictures

Si toutes les recrues embarquées grâce au film n’étaient pas prêtes à servir, le long métrage a néanmoins modifié considérablement la perception du public sur la flotte aérienne américaine.

Douze ans après la fin de la guerre du Vietnam, qui aura duré deux décennies, les jeunes spectateurs découvrant le film porté par Tom Cruise et Val Kilmer n’associent les interventions étrangères de l’armée américaine qu’à des protestations amères et au tollé international provoqué par les crimes de guerre commis.

Alors que l’intervention au Vietnam affectait toujours la vie quotidienne et augmentait les contestations à travers des œuvres comme « Platoon » et « Apocalypse Now », le public américain commençait progressivement à ne plus considérer l’armée comme une institution dont l’utilité était sujette à débat.

Critique « Top Gun » (1986) : Take my breath away ! - ScreenTune
© 1986 Paramount Pictures

Les choses ont bien entendu changé lorsque le drame d’Oliver Stone cité plus haut est sorti dans les salles obscures. À la fois haletant et tragiquement réaliste, il illustrait les réalités brutales de l’intervention au Vietnam au cinéma, la même année que « Top Gun ».

Film anti-guerre incendiaire écrit et réalisé par un vétéran du conflit, « Platoon » a été loué pour son réalisme et s’est avéré problématique pour l’armée américaine, car son peloton éponyme était peuplé de têtes brûlées inexpérimentées, de meurtriers sociopathes et d’antihéros engourdis et émotionnellement dévastés. Les militaires avaient besoin d’un portrait cinématographique plus flatteur, et ils l’ont obtenu avec le succès de « Top Gun ».

Critique « Top Gun » (1986) : Take my breath away ! - ScreenTune
© 1986 Paramount Pictures
  • Pourquoi l’impact de Top Gun est-il important ?

L’image d’un jeune pilote charmant et audacieux servant son pays était un puissant antidote au message anti-guerre de « Platoon », en particulier lorsque l’US Navy et l’Air Force n’étaient pas aussi étroitement associées aux drames du Vietnam que les fantassins particulièrement mis en scène dans des films réalistes sur le Vietnam comme « Apocalypse Now », « Platoon » et « Full Metal Jacket ».

L’augmentation directe des demandes d’enrôlements au sein de l’armée de l’air qui a suivi la sortie de « Top Gun » a prouvé que le film d’Oliver Stone n’avait pas rebuté les spectateurs de s’engager dans l’armée. En se concentrant sur l’US Air Force et la Marines plutôt que sur l’armée de terre, « Top Gun » a réussi à éluder les derniers conflits engendrés par l’Oncle Sam, et la seule mention de l’intervention au Vietnam dans le film illustre l’efficacité avec laquelle ce film de 1986 a réhabilité l’armée américaine.

Le Vietnam est brièvement mentionné dans l’histoire du père de Maverick, dont le personnage incarné par Tom Cruise pensait qu’il était mort par négligence pour finalement découvrir qu’il était prêt à se sacrifier courageusement pour sauver d’autres personnes pendant la guerre.

Critique « Top Gun » (1986) : Take my breath away ! - ScreenTune
© 1986 Paramount Pictures

L’ironie de la chose est que le comédien jouera plus tard dans le pamphlet anti-guerre « Né un 4 juillet » réalisé par un certain Oliver Stone pour lequel il décrochera un Golden Globe. En abordant ce questionnement intérieur du personnage de Maverick, « Top Gun » a réussi à transformer le Vietnam, source de honte pour l’armée américaine, en une guerre comme une autre, comme la guerre de Corée, la Seconde Guerre mondiale ou la Première Guerre mondiale. 

Le fait que le père du héros soit mort lors du conflit vietnamien a permis de reléguer l’événement dans le passé et a non seulement aider le personnage principal d’aller de l’avant et a aussi réhabilité l’armée aux yeux du public américain. C’est un stratagème également exploité de manière plus explicite et cartoonesque dans « Rambo II », qui a transformé le traitement des vétérans du premier « Rambo : First Blood en un scénario gore où le personnage principal combat à nouveau le Viet Cong, « mais cette fois, c’est l’Amérique qui gagne ». Ce sentiment se manifeste plus subtilement dans la réaction du public à « Top Gun », où l’armée américaine reprend ses activités habituelles, où toute mention du Vietnam est liée à l’héroïsme d’un soldat américain et où les actions des pilotes de chasse sont supposées être héroïques, utiles et, par-dessus tout cool.

Critique « Top Gun » (1986) : Take my breath away ! - ScreenTune
© 1986 Paramount Pictures
  • Un savoir-faire qui fait recette :

Allons-y franchement, tout sent le culte dans « Top Gun » ! À commencer par son histoire qui résume à elle seule la volonté de faire un clip pro Air Force et qui porte clairement la marque du producteur Jerry Bruckheimer. Un jeune pilote intrépide et qui discute les ordres face à un autre pilote tout aussi talentueux mais moins brillant. Maverick contre Iceman (Tom Cruise face à Val Kilmer) et entre les deux, une belle demoiselle (Kelly McGillis) qui tombe sous le charme du premier. Cliché oui, mais le tout est subtilement emballé par la musique d’Harold Faltermeyer notamment portée par les mythiques « Take my Breath Away » et « Danger Zone ».

Un film d’action qui a marqué toute une génération de par les magnifiques mouvements de caméra d’un Tony Scott inspiré. Chaque plan sonne comme une vraie réflexion d’en offrir plein les mirettes au public et de créer une réelle sensation de vertige grâce à des séquences virevoltantes.

La recette fonctionne parfaitement et laisse son audience bouche bée grâce à une montée du suspense prenante et ahurissante tout en saupoudrant le tout d’une tension dramatique, d’une romance passionnelle et bien entendu d’un zeste d’humour habilement dosé.

Critique « Top Gun » (1986) : Take my breath away ! - ScreenTune
© 1986 Paramount Pictures
  • Une autre manière de filmer :

« Top Gun » est un sacré spectacle, dont les scènes de combats n’ont toujours pas pris une ride après autant de temps.

Bien au contraire, le film pourrait encore donner quelques leçons à des œuvres contemporaines sur la façon de filmer et le découpage des séquences.

Tout cela grâce à la volonté inépuisable de son réalisateur, prêt à tout pour offrir aux spectateurs des séquences iconiques. Lors de la scène d’introduction, Tony Scott désirait d’ailleurs filmer des avions décollant et atterrissant sur le porte-avions avec comme lumière naturelle le soleil.

Le capitaine du porte-avions avait changé la trajectoire du navire, et lorsque le metteur en scène a demandé si le navire pouvait continuer à suivre la trajectoire et la vitesse précédentes, on lui a répondu que faire tourner le navire coûtait 25 000 dollars. Le cinéaste a alors fait un chèque rapide de 25 000 $ au capitaine pour que le navire puisse être retourné et qu’il puisse continuer à tourner cinq minutes de plus.

Et ce n’est pas la star du film qui dira le contraire : « Les images aériennes tournées dans le film sont à ce jour les meilleures jamais réalisées » et Tom Cruise en attribue tout le mérite au réalisateur Tony Scott, qui a utilisé les équipements les plus modernes de l’époque.

Les prises de vue aériennes dans les avions de chasse sont toujours aussi parfaites aujourd’hui, car les caméras étaient posées à l’intérieur des cockpits et sur les avions.

Critique « Top Gun » (1986) : Take my breath away ! - ScreenTune
© 1986 Paramount Pictures

Mis à part les scènes de combat, « Top Gun » a été l’un des premiers véritables « blockbusters ». Les producteurs Don Simpson et Jerry Bruckheimer ont été parmi les premiers à diffuser les bandes annonces percutantes qui promettaient deux heures d’action et de suspense. « Top Gun » était l’un des premiers grands films qui misait sur de jeunes acteurs, des beaux plans et de l’action plus que sur un scénario étoffé.

Un vrai régal toujours aussi agréable à regarder et qui n’a pas vieilli tout comme les avions utilisés. Comme déjà dit plus haut, tout est appuyé, kitch et « Too Much » dans « Top Gun ». C’est bien ce qui en fait toute sa saveur et qui le rend aussi attachant depuis de si longues années. Un must du cinéma des années 80 qu’on prend un malin plaisir à voir et revoir.

Critique « Top Gun » (1986) : Take my breath away ! - ScreenTune
© 1986 Paramount Pictures

Finalement, « Top Gun » a conquis les airs et nos cœurs devenant le symbole cinématographique de toute une génération de cinéphiles.

Le film du regretté Tony Scott ne ressemble pourtant qu’à un film « branché » avec toute la cohorte de clichés que cela laisse sous-entendre : cheveux au vent, corps de statues grecques (surtout Tom Cruise), chewing-gum, dents blanches, sourires ravageurs et chansons pop… On a vraiment l’impression d’assister à un clip mais pas n’importe lequel, celui d’un monument du cinéma entertainment des eighties. 

Notamment, pour ces fameuses et fabuleuses séquences aériennes sans égales à ce jour, sur fond de vraie – fausse rivalité de camaraderie entre pilotes et saupoudré d’une jolie petite love story.

Une musique inoubliable et un trio d’acteurs attachants pour un film qui sentait bon la testostérone en plus d’être un agréable moment pour s’envoyer en l’air (dans le sens du film bien sûr).

Note : 8/10

Julien Legrand– Le 26 septembre 2021

Sources Photos :

  • © 1986 Paramount Pictures

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