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Voyage en classe verte !

The Green Knight

David Lowery nous avait laissés chamboulés, émus et hypnotisés par son dernier film « A Ghost Story » conte d’une beauté impérissable sur la mort et le deuil. Le cinéaste américain revient cette fois avec « The Green Knight », adaptation d’un poème du XIVe siècle intitulé « Sire Gauvain et le Chevalier vert » qui a énormément influencé la littérature anglaise.

Produit par la société indépendante très à la mode A24, notamment derrière « Midsommar », « Hérédité » ou encore « The Lighthouse », David Lowery plonge dans le mythe arthurien mais en s’attardant à l’instar de « Excalibur » de Boorman, sur le neveu du détenteur de l’épée magique : le jeune Gauvain, pas encore chevalier, incarné par le toujours excellent Dev Patel.

Entre mythe, légende et quête existentielle, « The Green Knight » est aussi intriguant qu’envoûtant. Préparez-vous !

Critique « The Green Knight » (2021) : Voyage en classe verte ! - ScreenTune
© 2021 The Searchers

Synopsis :

Sire Gauvain, chevalier de la table ronde du roi Arthur, dont il est également le neveu, accepte le défi lancé par un mystérieux Chevalier vert. Il doit le décapiter. Gauvain s’exécute. Le Chevalier vert repart avec sa tête sous son bras et lui rappelle que, dans un an, ils vont devoir se retrouver…

 

La filmographie de David Lowery est incroyablement diversifiée, capable de productions intimistes et osées comme « Les Amants du Texas » ou « A Ghost Story » et la dernière apparition de Robert Redford dans « The Old Man & The Gun » ; mais il se tourne aussi vers les blockbusters de Mickey avec la très réussie adaptation live de « Peter et Elliott le dragon » avec ses accents mélancoliques de l’enfance en plus d’offrir de magnifiques séquences contemplatives.

Il retrouvera d’ailleurs la firme aux grandes oreilles pour une seconde collaboration avec une nouvelle adaptation de Peter Pan intitulée : « Peter Pan & Wendy ».

Attendu sur les écrans en 2020, « The Green Knight » a pris son temps pour arriver dans les salles obscures belges du moins, toujours aucun distributeur pour la France, le moins que l’on puisse dire c’est que l’œuvre de David Lowery fait naître de belles discussions entre spectateurs et cinéphiles.

Critique « The Green Knight » (2021) : Voyage en classe verte ! - ScreenTune
© 2021 The Searchers

« The Green Knight » est une œuvre particulièrement exigeante, méticuleuse et déstabilisante, sorte de voyage entre quête existentielle et découverte du merveilleux gorgée par les obsessions qui caractérisent tout le patrimoine cinématographique de son metteur en scène.

Entre fantastique et drame intimiste, le cinéaste joue avec l’attente qui définit son aventure, la volonté de Sire Gauvain de devenir un homme en accédant au rang de chevalier à travers cette quête du chevalier vert. Un périple qui ne sera pas de tout repos pour l’aspirant à la table ronde, celui-ci sera semé d’embûches et de rencontres insolites qui façonneront sa personnalité et sa légende. En effet, le royaume du roi Arthur se meurt, un souverain émacié et vieillissant, des chevaliers dans la fleur de l’âge en passant par des paysages dévastés par la mort et des pillards, tout sonne la fin des jours paisibles. Brutale, inhospitalière, la couleur verte envahit la nature et colonisera bientôt la civilisation.

Critique « The Green Knight » (2021) : Voyage en classe verte ! - ScreenTune
© 2021 The Searchers

David Lowery reste presque fidèle au poème dont il s’inspire, malgré quelques séquences anachroniques pour l’époque (le baise main par exemple n’était pas dans les moeurs à l’époque des chevaliers) tout en surprenant le spectateur par des cadrages malins, une mise en scène inspirée et le traitement de son personnage principal.

Le neveu du roi Arthur, souvent éclipsé dans la culture populaire et les adaptations cinématographiques, est moins célèbre que ses condisciples les chevaliers Lancelot ou même Perceval. Cependant le fils du roi Lot (qui n’apparaît pas et ne parle pas en latin comme dans « Kaamelott ») et de Morgause (ici décrite comme une sorcière servant ses propres desseins) est pourtant considéré comme un chevalier honorable et au cœur pur se voit ici dépeint comme paresseux, fréquentant des maisons de passe, impuissant et avide faire ses preuves.

Critique « The Green Knight » (2021) : Voyage en classe verte ! - ScreenTune
© 2021 The Searchers

Gâté par sa mère et amoureux d’une prostituée campée par la talentueuse Alicia Vikander, Gauvain est en constante recherche de repères et de lui-même. Des traits bien différents du héros décrit dans le poème mais un prétexte intéressant pour David Lowery afin de développer des thématiques qui lui sont chères comme la loyauté, les questionnements affectifs, la séduction, la fidélité et la passion, autant d’obsessions qui jalonnent la filmographie du cinéaste.

Tous ces choix cornéliens qui tourmentent Gauvain, interprété par un Dev Patel toujours aussi juste et convaincant dans des rôles torturés, font de « The Green Knight » une œuvre ambiguë et contemporaine. Le voyage onirique de son personnage principal oblige le spectateur à être attentif, à comprendre et à replacer les événements dans leur contexte. 

Critique « The Green Knight » (2021) : Voyage en classe verte ! - ScreenTune
© 2021 The Searchers

Un pari risqué tant le cinéma actuel déversant souvent la même soupe sur nos écrans tout en caressant le spectateur dans le sens du poil. Malheureusement, le film de David Lowery explique peu les tenants et aboutissants du conte original, le metteur en scène préfèrant laisser son récit se dérouler sous nos yeux à travers une poésie visuelle impressionnante. Cependant, « The Green Knight » malmène quelque peu son public, sans trop dépeindre la diégèse de son univers, sans rien expliquer plus que de mesure…. Un choix qui laisse une grande partie de son audience sur le carreau.

Critique « The Green Knight » (2021) : Voyage en classe verte ! - ScreenTune
© 2021 The Searchers

Beaucoup seront déçus par la proposition qu’offre David Lowery avec « The Green Knight », sorte de voyage mystique transformé en quête existentielle pour un apprenti chevalier parfaitement interprété par Dev Patel.

Un exercice de style pourtant habilement mis en scène qui propose une très belle relecture du mythe arthurien et qui propose une expérience sensorielle envoûtante à tout spectateur prêt à accepter cette fresque merveilleuse mais qui en laissera pourtant beaucoup indifférents.

Note : 7/10

Julien Legrand– Le 9 août 2021

Sources Photos :

  • © 2021 The Searchers

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