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Critique « The Suicide Squad » (2021) : James dégaine les Gun(n) !
DC Comics et Warner repartent à l’assaut des salles obscures avec « The Suicide Squad » porté par la folie d’un James Gunn et sa bande de joyeux losers. Verdict !
Quand le cru s’y fixe !
Sexe, violence et religion… mort, corps et pulsions… telles sont les thématiques ancrées dans l’œuvre du cinéaste néerlandais depuis les origines de son Art, comme en témoignent ses premiers longs métrages, « Wat Zien Ik ? », « Turks Fruit », « Keetje Tippel », « Spetters » et « De Vierde Man », entre 1971 et 1983. Ces mêmes thématiques se retrouveront, en tout ou en partie, dans un film « charnière » (« La Chair et le sang » en 1985), avant de hanter sa période américaine et ses trois grands succès (« Robocop », « Total Recall », « Basic Instinct », 1987-1992). Après les crucifixions critiques et publiques de « Showgirls » (1995) et « Starship Troopers »(1997), œuvres devenues cultes aujourd’hui, et l’échec de « Hollow Man » (2000), Paul Verhoeven reviendra en Europe, tardera à retrouver ses marques (à l’exception de « Zwartboek » en 2006) et connaîtra bon nombre de désillusions avec de multiples projets avortés.
Il renouera enfin avec le succès en 2016 grâce à « Elle », adaptation du roman « Oh… » de Philippe Djian, produit par Saïd Ben Saïd, avec Isabelle Huppert, Virginie Efira, Laurent Lafitte, Anne Consigny et Charles Berling, un film sélectionné à Cannes et qui glanera plus de 150 récompenses de par le monde, dont plusieurs Golden Globes et Césars ainsi qu’une nomination à l’Oscar pour Isabelle Huppert.
Synopsis :
Au 17ème siècle, alors que la peste se propage en Italie, la très jeune Benedetta Carlini rejoint le couvent de Pescia en Toscane. Dès son plus jeune âge, Benedetta est capable de faire des miracles et sa présence au sein de sa nouvelle communauté va changer bien des choses dans la vie des soeurs.
Avec « Benedetta », à nouveau produit par Saïd Ben Saïd, Verhoeven retrouve son terrain de prédilection en adaptant l’ouvrage Sœur Benedetta, entre sainte et lesbienne de l’historienne américaine Judith C. Brown, qui retrace le procès en saphisme de Benedetta Carlini, une nonne italienne du XVIIe siècle qui intègre le couvent de Pescia en Toscane dès son plus jeune âge.
« Benedetta », est le portrait magnifié d’une femme profondément mystique (Virginie Efira), habitée par le doute lorsqu’elle est confrontée à la présence au couvent d’une novice, Bartoloméa (Daphné Patakia), une jeune fille pauvre et marquée par les épreuves, pour laquelle elle ressent un désir irrépressible.
La vision donnée par Verhoeven de Benedetta, cette jeune femme à l’apparence solaire, sème le trouble… Sincère ou manipulatrice, profondément humaine et nourrie par le doute ou illuminée sombrant dans la folie, innocente ou coupable, le cinéaste se garde bien de trancher…
Benedetta est avant tout une victime… Victime de l’abandon de ses parents qui la livrent au couvent, victime d’une société dominée par les hommes, victime de la docilité imposée par l’Église…
Dans un tel cadre, ses choix et ses actes ne sont-ils finalement pas guidés par sa seule volonté de se dédouaner d’un système oppressant où la soumission est le seul mot d’ordre ? N’est-elle pas la seule qui parvient, dans un contexte aussi malsain et au prix d’un jeu particulièrement dangereux, à rester « libre » ? La scène la plus violente du film n’est-elle pas en réalité cet abandon parental en tout début de récit, où la jeune enfant est livrée au couvent, sonnant le glas du plus précieux fondement de la construction d’un Être : l’écoute, l’attention, l’affection de ceux qui lui ont donné la Vie ? Sa quête d’amour n’est-elle pas, tout simplement, sa plus profonde ambition ?
Pour appuyer son propos, Paul Verhoeven livre un récit contre l’hypocrisie, féministe et sans tabous, avec des niveaux de lecture multiples, alternant de manière plutôt ludique scènes inspirées et monuments de provocations kitsch. Sans qu’il n’oublie au passage de truffer son récit de punchlines et de dialogues anachroniques (soulignant au détour l’intemporalité du propos).
Virginie Efira, lumineuse, s’inscrit parfaitement dans l’univers du cinéaste, jouant avec talent toute l’ambiguïté de son personnage. Daphné Patakia (à l’affiche de la série OVNI(s)) livre elle aussi une belle performance, alors que Charlotte Rampling, et plus encore Lambert Wilson et Olivier Rabourdin, sont impeccables dans des compositions particulièrement habitées…
Une chose est certaine. Paul Verhoeven, à 83 ans, poursuit son œuvre en toute liberté et avec cohérence, nourrissant à nouveau le gouffre qui peut si souvent séparer ses détracteurs qui ne voient en lui qu’un provocateur amoral et iconoclaste s’adonnant à la facilité et aux effets de style grotesques, vulgaires et outranciers et ses fidèles disciples pour lesquels il reste un réalisateur majeur, inspiré et dont l’œuvre brillante et brûlante se veut libertaire et progressiste…
Vincent Legros – Le 18 juillet 2021
Sources Photos :
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