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La guerre sucite l'(é)motion de sang sûr

The Post (2018)

Que dire encore sur Steven Spielberg, tout a déjà été écrit, tout a déjà été dit. Pourtant le papa d’« Indiana Jones », d’« E.T. » et de « Jurassic Park» arrive toujours à nous surprendre. Le réalisateur se retrouve toujours là où on ne l’attend pas ! Après « Lincoln » en 2012 qui avait vu Daniel Day-Lewis offrir encore une performance hors du commun, Spielberg revisite de nouveau un pan de l’histoire américaine. Cette fois-ci, ce n’est pas en pleine abolition de l’esclavage que le réalisateur « Des Dents de la Mer » plonge son spectateur mais bien au milieu des années 70 en plein bourbier de la guerre du Vietnam.

Inspiré de faits réels, « Pentagon Papers » ou « The Post » narre l’histoire de la nouvelle directrice du « Washington Post » interprété par la brillante Meryl Streep et son rédacteur en chef (le toujours génial Tom Hanks), tous deux prêts à faire éclater la vérité au grand jour sur les agissements successifs de plusieurs gouvernements sur le conflit en cours au Vietnam.

Un casting 5 étoiles, un réalisateur de renom, des Oscars à la pelle, « The Post » a tout de la machine à statuettes dorées.

Soyons francs, « The Post » n’est pas le meilleur film de Spielberg, mais le cinéaste a l’art de captiver son audience avec si peu de choses. Il faut rendre à Steven ce qui appartient à Steven, il capte à merveille l’essence des années 70 et a le mérite d’ancrer parfaitement son film dans l’époque dans laquelle il s’inscrit. Des costumes authentiques, des décors réalistes et une mise en abîme impeccable qui captive par sa reconstitution.

 

Le cinéaste fait renaître l’ambiance d’un genre depuis longtemps oublié, le thriller d’investigation politique tel que « Les Hommes du Président » de Pakula (avec Robert Redford et Dustin Hoffman) auquel Spielberg rend d’ailleurs hommage.  Avec son scénario bien ficelé, « The Post » offre une histoire que le spectateur peut suivre sans difficulté. Il est vrai que Spielberg est un conteur hors pair, il arrive par la puissance de sa mise en scène à transporter son public dans cette enquête journalistique aux thématiques riches (la liberté de la presse, les rapports de pouvoirs hommes-femmes …) qui va changer à jamais le destin de deux personnes et d’un journal entier.

Pourtant, s’il faut reconnaître à « The Post » une esthétique élégante et une histoire rythmée, il n’en est pas de même pour l’interprétation des acteurs. Meryl Streep qui aurait dû interpréter avec brio une femme forte qui lutte pour ses convictions dans un monde d’hommes ne donne pas la pleine mesure de son talent. Quant à Tom Hanks, même s’il est capable de belles envolées de jeux, il a tendance à exagérer son propos.

Cependant, « The Post » est parfois capable de grands moments de finesse et d’intelligence d’abord dans la manière dont il aborde son époque et ensuite dans sa façon de scruter la personnalité de ses personnages.

 

On aurait aimé une enquête plus retord, une Meryl Streep qui impose plus sa voix dans ce monde à dominance masculine. Là où un film comme « Spotlight » jouait à fond la carte de l’enquête fouillée où plus les journalistes creusaient plus c’était moche, « The Post » laisse plus de place à ses personnages sans pour autant donner une dimension épique à son investigation.

« The Post » est un bon Spielberg que les fans du cinéaste devraient aimer dans son ensemble grâce à une reconstitution impeccable et une mise en scène stylisée et recherchée. Un film qui s’inscrit dans l’air du temps et qui résonne encore avec l’actualité quotidienne outre-Atlantique, mais pas le grand film attendu dont les deux nominations aux Oscars (meilleur film et meilleure actrice) ne devraient rien rapporter.

 

 

Note: 7/10

 

Julien Legrand – 04 mars 2018

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